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*Je tiens à remercier les éditions Fayard et Hachette Canada pour ce service de presse*

-Le ciel ne parle pas 
-Morgan Sportès 
-Éditions Fayard – 2017 
-320 pages 
-Roman historique, clandestinité, martyr, japon, XVIe siècle, religieux, torture, théologie. 

Le commentaire de Martine : 
À la manière d'un brillant et captivant professeur d'histoire, l'auteur Morgan Sportès nous présente un roman historique qui se déroule dans le Japon du XVIIème siècle, et il nous retrace l'histoire de Christóvão Ferreira, jeune jésuite portugais ayant quitté son pays d'origine pour aller prêcher la bonne parole au pays du Soleil Levant. Une bonne parole à laquelle il renonce pourtant bien vite, après cinq heures de mise au supplice de la fosse, apostasie et se convertit au bouddhisme avant d'intégrer l'Inquisition nippone. 
On ressent que l'auteur connaît bien cette partie du monde, il est évident qu'il s'est bien documenté pour nous offrir un ouvrage érudit sur la question. Il ne nous épargne pas, les cruautés pittoresques pratiquées par les japonais, dignes de celles des Romains de l'antiquité. Concernant le ton employé, il est teinté d’une ironie qui permet d’alléger le propos au fil des chapitres. C'est religieusement, que j'ai lu les propos de Morgan Sportès avec un grand intérêt, captivé par le déroulement de cette sombre période de l'histoire nippone, tendant vraisemblablement à anéantir toute trace du christianisme au sein du Japon. Non pas pour la religion en tant que telle, mais plutôt pour la menace que représentait en réalité le roi d'Espagne. C'est aussi fascinant que riche d'enseignements pour moi qui, je l'avoue, avait une petite connaissance du Japon, et de cet épisode de l'histoire de la chrétieneté dans le monde. 
Au-delà du récit, l'auteur nous soumet à une intense réflexion presque philosophique sur notre actualité. En effet, les djihadistes qui s'envolent vers la Syrie pour mourir en martyr au nom d'Allah ne sont-ils pas ces Portugais d'hier qui voguaient vers le Japon pour mourir en martyr au nom de Dieu ? Mais la religion ne subit-elle pas quelques maux et travers, autant politiques que financiers qui ne lui appartiennent pourtant pas ? Et de Ferreira, parlons-en... N'est-ce pas lui qui s'en sort le mieux et sème le doute dans l'esprit de nos fervents croyants ? Est-il le plus grand des traîtres à la chrétienté où au contraire avait-il finalement raison de renoncer à sa religion pour sauver sa propre vie et assurer ses intérêts ? 
Des questions de ce genre, je m'en pose aujourd'hui, et je m'en poserai sans doute toujours. 
La plume de l'auteur est admirable, captivante et elle ouvre à la réflexion, nous amenant aussi à la remise en question. 
Une agréable lecture qui m'a fait réfléchir. 

Résumé : 
1609 : Christovao Ferreira, jeune jésuite portugais plein de ferveur chrétienne, débarque à Nagasaki. Ce port est alors un panier de crabes : trafics d'or, de soie, d'esclaves auxquels s'adonnent des commerçants du monde entier. Le sud du Japon devient par ailleurs un terrain où s'affrontent les intérêts impérialistes des Anglais, des Espagnols, des Portugais, des Hollandais et où s'importent leurs querelles religieuses : protestants contre catholiques. 
Accueillis d'abord avec sympathie, les missionnaires sont bientôt suspects aux yeux des Shogun Tokugawa qui dirigent le pays d'une main de fer. On voit en eux l'avant-garde des conquistadors du roi d'Espagne. Commencent alors d'impitoyables persécutions. Passé dans la clandestinité, Ferreira est arrêté, mis à la torture. Il a le choix : mourir en martyr comme tant de ses semblables ou apostasier et travailler dans les rangs de l'Inquisition nipponne... Dans ce Japon énigmatique « tout à l'envers de nos moeurs » où il a si longtemps vécu, et en ces temps où le doute métaphysique a frappé les esprits les plus éclairés d'Europe, Ferreira, lui-même ébranlé dans ses convictions, cèdera-t-il à ses bourreaux ? 
Avec ce roman « historique » plein de noire ironie, Morgan Sportès nous tend une sorte de miroir où, à trois siècles de distance, se reflètent d'Orient en Occident les mêmes problématiques : Dieu, l'argent, le choc des civilisations, la liberté de commercer et de circuler et - mot déjà très en vogue à l'époque - la souveraineté des États.

Tag(s) : #ROMAN HISTORIQUE, #MARTYR, #JAPON, #RELIGIEUX, #TORTURE, #THÉOLOGIE